Les 5 Tibétains, aussi appelés 5 rites tibétains, est une pratique corporelle de longévité ramenée de l'Himalaya dans les années trente par un certain colonel Bradford s'étant confié à Peter Kelder au sujet de cette fameuse "fontaine de jouvence".
On ne sait pas grand chose de Peter Kelder et il ne semble pas avoir eu de la longévité dans le domaine de l'écriture. Mais il a eu le mérite indéniable de proposer cet ouvrage* relatant le récit du colonel et la description des 5 rites.
Le mystère entourant les protagonistes, les promesses de rajeunissement, les manuscrits retrouvés permettant de dévoiler un sixième rite, les pratiques secrètes et finalement révélées, tout cela m'évoque un teasing bien rôdé à l'américaine interpellant nos structures mentales occidentales avides de nouveautés exotiques.
Mais cet enchaînement de mouvements a tout de même fait ses preuves auprès de nombreux pratiquants et même s'il n'existe pas d'études pouvant attester de ses bienfaits d'un point de vue scientifique ou médical, le point de vue empirique nous permet de poser quelques affirmations.
*Le premier ouvrage de 1939 "The eye of revelation" a été adapté dans un texte didactique "Ancient Secret of the Fountain of Youth" en 1985 et la première traduction française "Les 5 Tibétains, le secret de jeunesse et de longévité" date de 1995.
Partage d'expérience
Plutôt que de vous lister les bienfaits en mode copié-collé que vous pouvez retrouver dans de nombreux articles par vous-même, je préfère vous partager l'expérience que j'en ai.
Lors du premier contact avec les 5 Tibétains, je suis débutante en yoga, j'ai deux enfants en bas âge et un boulot prenant. J'achète ce tout petit livre qui tient en poche et résume la pratique de manière très succincte ; l'objet est joli et fait partie d'une collection bien-être dont j'ai quelques exemplaires.
Je commence à les pratiquer en dilettante, juste quand j'y pense, le weekend ou en vacances. Puis je me souviens d'une période où je les ai pratiqué sur quelques jours tous les matins. Je constate alors que je ressens moins de fatigue dans la journée, moins de fluctuations nerveuses aussi.
Puis je passe à autre chose, la vie avance, le petit livre rejoint l'étagère et passe de carton en carton, d'adresse en adresse. Je développe la pratique du yoga et ressens les mêmes avantages à la pratique quotidienne, même courte, mais tous les jours : réduction du stress, de la fatigue, meilleure forme physique…
Lors de ma post-formation Yoga & Ayurveda auprès de Michèle Lefèvre et Isabelle Moysan de l'école Yogamrita, nous abordons à nouveau cette pratique. Je décide d'en faire une sadhana quotidienne pendant une période donnée pour en ressentir les effets dans la régularité. Je choisis l'été au lever du jour ou en tout cas au plus frais de la journée car, à cette période, l'été étant très chaud, la pratique de yoga en grosse chaleur ne me réussit pas. Parfois, j'ajoutais une seconde session en fin de journée mais pas de manière systématique. Les 5 rites pratiqués en fin de journée peuvent occasionner un regain d'énergie et gêner le processus naturel de mise au repos qui nous amène doucement vers le mode nocturne.
J'ai pu en effet constater qu'une pratique en soirée pouvait retarder le marchand de sable…
Je suis loin d'être une athlète, je manque de tonicité et mes articulations souffrent parfois : ou de l'excès d'exercice, ou de l'absence d'exercice, ma nature est ainsi faite :-) Je dois en conséquence naviguer dans cette nature mouvante pour renforcer sans trop forcer et stimuler sans trop contraindre.
Cette pratique à cette saison m'a bien convenue. J'ai commencé par des séries de 7 mouvements par rite sur une semaine puis la semaine suivante, je suis passée à 10 mouvements par séquence. Et ainsi de semaine en semaine, je suis arrivée à effectuer 14 mouvements par rite et me suis installée dans cette sadhana durant tout l'été.
J'ai ensuite laissé cette pratique de côté pour la remplacer par une autre en automne car elle n'était plus adaptée à mes besoins.
Depuis cette expérience, je reprends parfois cette pratique quotidienne sur un temps donné. Mon corps s'étant renforcé depuis cette période, je peux commencer les répétitions à 21 tours pour le premier rite et 14 pour les suivants et je termine la période par effectuer tous les rites 21 fois.
NB : 21 est le nombre de répétitions qu'il est conseillé de ne pas dépasser par mouvement.
Voici les effets que j'ai pu observer :
- Vitalité accrue
- Aisance respiratoire
- Renforcement musculaire (notamment le dos, le cou, l'abdomen, les bras)
- Renforcement articulaire (notamment les poignets et les épaules)
- Stabilité du système nerveux
- Circulation énergétique perceptible
- Plus grand équilibre émotionnel et physique
Concrètement
Dans les lignes ci-dessous, je décris chaque rite avec quelques conseils.
Il existe aussi un guidage vidéo si vous préférez ce format (mais je n'y donne pas toutes les recommandations).
Il se trouve par ici :
LE PREMIER RITE
Il consiste "tout simplement" à tourner sur soi-même, tel un derviche tourneur, dans le sens horaire c'est à dire de gauche à droite, les bras restant à l'horizontale.
Mais pas si simple que ça lorsqu'on sent le vertige nous faire chavirer ! Pour cela, trois astuces "anti-tourni".
- La première est de placer votre main droite à hauteur des yeux et de fixer visuellement un point sur votre main pendant vos rotations.
- La seconde est de maintenir un léger Mūla Bandha pendant l'exercice, c'est à dire une présence musculaire douce au niveau du plancher pelvien.
- La troisième astuce consiste à ralentir à l'issue de votre dernier tour puis de changer le sens de rotation sur un tout dernier tour effectué en lenteur.
Lorsque ce premier rite est terminé, vous pouvez rester debout regard devant vous ou paupières abaissées pour observer les effets. Lorsque vous débutez, vous pouvez aussi ressentir l'envie de vous asseoir ou vous étendre un petit moment. Faites donc, et observez quelques instants.
LE SECOND RITE
Pour le deuxième rite, il faudra vous étendre au sol et placer les mains à plat sous le mou des fesses. Veillez à allonger le cou en rapprochant le menton de sa base. Inspirez ici et sur l'expiration, sollicitez votre force abdominale pour relever les jambes ensemble et la tête. Sur l'inspiration suivante, redescendez vos jambes avec la tête et poursuivez ainsi. Expir : rassemblez, inspir : étendez.
Il se peut que vous ressentiez des difficultés à monter les deux jambes droites ensemble. Si c'est le cas, fléchissez-les pour les ramener l'une après l'autre vers la poitrine et étendez-les ensemble à la verticale dans le second temps de votre expir. Vous essaierez ensuite de les redescendre progressivement ensemble en les retenant de la pesanteur pour renforcer votre gainage. Puis au fil du temps, votre force vous permettra de les lever ensemble avec la tête.
Il est également possible au début que le cou n'ait pas suffisamment de force pour retenir ainsi la tête dans l'effort. Vous pouvez, dans vos premières pratiques, la laisser au sol pour concentrer vos efforts sur les jambes puis la soulever au fil du temps un petit peu plus du sol, menton rapproché du cou. A terme, vous pourrez même la laisser soulevée du début à la fin de l'exercice !
LE TROISIÈME RITE
La position de départ consiste à se placer en appui sur les genoux et les orteils retournés, bras le long du corps.
Assurez-vous de ne pas démarrer avec le bassin "versant" vers l'avant, c'est à dire avec un creux lombaire déjà installé.
A l'expiration, la tête (et seulement la tête) se fléchit pour amener le menton vers la poitrine au plus haut vers le creux de la gorge. En inspirant, enroulez les épaules vers l'arrière et le bas en amenant les mains derrière les fesses ou les cuisses et basculez la tête en déployant la gorge, le menton cherchant l'espace vers le ciel.
Expir : corps vertical, tête abaissée. Inspir : ouverture vers l'arrière et le haut.
Si vous êtes coutumier.ère des lombalgies, vous veillerez à ne pas forcer l'extension sur l'inspir en gardant le milieu et la partie basse du dos dans l'axe des cuisses pour ne mobiliser que les épaules, le cou et la tête. A l'expir, vous pourrez légèrement vous arrondir vers l'avant en prenant appui sur le haut des cuisses.
Si en revanche vous vous sentez très à l'aise dans les extensions, vous pouvez tenter une variante vous emmenant dans l'inspir jusqu'à la posture de Uṣṭrāsana, posture du chameau. Vous laisserez ensuite l'expir vous arrondir de manière plus marquée, fessiers descendant jusqu'aux talons.
LE QUATRIÈME RITE
Avant d'effectuer ce quatrième Tibétain, je vous conseille d'effectuer quelques assouplissements des poignets qui vont être sollicités pour les deux derniers exercices.
Il s'agira ensuite de venir s'asseoir sur les fesses, jambes devant vous, écartées de la largeur de vos hanches, dos redressé, menton proche de sa base, avec les mains au sol de chaque côté du bassin, doigts vers l'avant ou légèrement vers l'extérieur (vous aurez peut-être reconnu Daṇḍāsana, la posture du bâton). Expirez ici puis, sur l'inspiration, soulevez les fesses du sol et laissez-les glisser vers les talons puis vers le ciel en basculant la tête vers l'arrière. Le corps, en appui sur les bras et les jambes, est droit comme une table, c'est la posture de Catuṣ pāda pīṭham (table à quatre pieds). A l'expiration, revenez vers l'arrière dans la posture de départ.
Inspir : table à quatre pieds. Expir : posture du bâton.
Vous pourrez, au début de vos pratiques, faire une petite pause avant de repartir dans la table. Puis au fil du temps, vous vous sentirez à l'aise pour vous balancer d'une posture à l'autre sans reposer les fesses au sol.
Pour cela, il faut évidemment avoir une longueur de bras permettant ce passage ! Si ce n'est pas le cas, vous pourrez placer une brique sous chaque main pour vous surélever.
Si vous souffrez de traumatismes au poignets, vous pouvez choisir de vous appuyer plutôt sur vos phalanges.
LE CINQUIÈME RITE
Le dernier rite Tibétain est une alternance entre deux postures-star du Hatha Yoga : le chien tête en haut (Urdhva mukha śvānāsana) et le chien tête en bas (Adho mukha śvānāsana). On inspire en allant dans le chien tête en haut et on expire pour rejoindre le chien tête en bas, et ainsi de suite si possible sans interruption.
Trouvez la bonne distance entre la ligne de mains et celle des pieds pour vous permettre d'aller de l'une à l'autre aisément. Si ce n'est pas possible au début, ajustez entre chaque posture et cela viendra avec le temps.
Si vous n'avez pas l'habitude de ces postures, veillez, dans le chien tête en bas, à ne pas vouloir absolument tendre les jambes ni poser les talons, cela pourrait réduire l'étirement du dos que l'on recherche. Le bassin cherche à aller au plus haut et à s'éloigner le plus possible de la ligne des mains. Dans le chien tête en haut, repoussez bien le sol avec les bras pour ne pas "tomber" dans les articulations des épaules. Même recommandations si les poignets sont douloureux, on peut pratiquer ces deux postures en appui sur les phalanges ou bien reposer les mains sur 2 briques. Si vos lombaires sont un peu sensibles, vous pourrez pratiquer en allant dans une planche à l'expir pour ne pas creuser trop le dos.
DERNIERS CONSEILS
- Respectez vos possibilités et votre horloge interne
- Honorez votre corps et sa capacité d'apprentissage
- Écoutez vos signaux d'alerte et n'allez pas en zone douloureuse
- Réduisez la voilure si vous ressentez de la fatigue, cette pratique ne génère pas de fatigue
- Si vous avez des problèmes de santé, consultez l'appendice des recommandations dans le livre, ou parlez-en avec votre praticien
Avant même de décrire la pratique des 5 Tibétains, le colonel Bradford explique à Peter Kelder la finalité de ces rites :
(…) "le corps a sept centres que l'on peut appeler vortex ou "tourbillons d'énergie", des sortes de tourbillons magnétiques qui tournent à grande vitesse dans le corps d'une personne en bonne santé, mais qui ralentissent en cas de mauvaise santé ou de sénilité. Ces centre d'énergie rayonnent au-delà des limites de la peau chez un individu en bonne santé, mais chez une personne âgée ou faible, il atteignent à peine la surface du corps. le moyen le plus rapide pour retrouver jeunesse et vitalité, est de remettre en mouvement ces centre énergétiques."
Nous aurons reconnu la description des désormais-très-connus Chakras !
Mais nous savons aussi que notre approche occidentale peut en être très superficielle. Il ne s'agit pas seulement d'exercices physiques pour toucher ces centres qui se situent sur un plan plus subtil. La présence de la conscience lors de la pratique sera primordiale.
Si, au début, on se concentre sur les aspects physiques et les points d'attention pour ne pas se blesser et respecter ses possibilités, il sera utile, après cela, de dépasser l'aspect "gymnique" de la pratique pour en faire pourquoi pas une méditation en mouvement. C'est sans doute pour cela qu'ils se nomment des rites et non des exercices. Peut-être nous permettent-ils comme en Yoga de dépasser le plan du corps pour amener la conscience dans un état plus subtil ?
A vous d'essayer et d'en juger.
BONNES PRATIQUES
BIBLIOGRAPHIE
- "Les cinq Tibétains : Le secret de la jeunesse et de la vitalité" par Peter Kelder ; éditions "J'ai lu" 2016 ; ISBN-10 : 2290129100 ; ISBN-13 : 978-2290129104
- "Les secrets des 5 tibétains" par Jason Gyre ; éditions "Courrier du Livre" 2010 ; ISBN-10 : 2702908241 ; ISBN-13 : 978-2702908242
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